J'fit pas dans le moule
Même si j'ai essayé. Il y 7 ans vivait une délicate princesse dans son vaste chanteur enchanteur avec son prince et ses 2 labradors. Certes, il ya des hauts et des bas, même des hauts et des butch, mais nul ne présupposa le dénouement de ce qui semblait être, aux yeux de tous, un véritable conte de fées.
5 ans de couple. Ce qui est à toi est à moi qu'on dit quand ça va bien, mais quand vient le temps de se séparer le patrimoine, ça s'applique pu vraiment. Si cette histoire était une fable de Lafontaine, elle aurait eu la morale suivante: méfie-toi toujours de sa collègue élancée avec le maquillage mal appliqué au teint de porcelaine qui fait du bateau dragon. J'te laisse imaginer l'reste. Ça finit régu mal mettons.
Pis moi j'aurai été le personnage semi-vainqueur semi-victime. Celui dont tout le monde doutait depuis le début.
Aucun regret. Pas tant de larmes non plus. Une boîte de Kleenex passé à essuyer ma morve, gros max. Pas de gros yeux bouffis irrités qui ont l'air fermés en permanence parce qu'ils sont trop enflés d'avoir pleuré pendant non-stop des heures. Pas de gros vide en moi disant que j'allais finir tu seule. Pas de gros serrement dans la poitrine. Pas de réveil en pleine nuit en me rappelant mon célibat naissant. Rien. J'allais plutôt bien. Considérant que je venais de me faire crisser là pour une autre, que j'avais dû déménager pour que cette autre emménage, j'étais un rayon de soleil.
Un bac à linge sale en guise de baluchon, retour au point de départ, ma chambre au sous-sol chez papa. Seule différence, 5 ans et plus tard, à 23 ans, cette chambre avait perdu sa fraîcheur et son statut de chambre d'ado. Là, j'étais pathétique. Le goût de la liberté de jadis était devenu un goût d'échec. J'avais moyen envie d'inviter mes amis pour venir fumer un joint en écoutant du Snoop.
Honnêtement, les possessions matérielles c'était pas si grave, je m'en crissais des 2 sdb, je peux pas pisser à 2 endroits en même temps, t'as beau avoir une brosse à dents dans chacune, tu te soiedentarises pas plus souvent . Mais j'étais amère sur un esti de temps de ma creusée. Même les grenouilles qui venaient se coincer dans le filtreur me manquaient. Je leur avais pas assez dit que j'aimais leur présence. Je m'excuse pour toutes les vôtres décimés par mes 2 chiens. Vraiment. Avoir su. Je vous aurais fait une sépulture convenable.
J'étais aussi amère de mon statut. Ma vie de p'tite madame criait victoire, prospérité, succès. Je viens pas de loin, mais ma banlieue fait dans le très traditionnel. La réussite passe par les possessions, par la création d'une famille en jeune âge, par être matchée. Faut tu fit dans le beau moule, c'est ça chez nous. Beaucoup. C'est bien vu d'avoir son beau bungalow, ses 2 marmots, son petit mariage sur le bord de l'eau. Le tableau conventionnel là.
Je passais mes fins de semaine à jardiner en buvant des bloody césar triple. Je fittais pas dans mon quartier. Le quartier des belles fleurs et du gazon frais tondu. Là où la moyenne d'âge était de 45 ans. On dérangeait en criss avec nos 20 ans tapant pis nos tendances à avoir plus de monde que de place à maison.
J’étais ailleurs. Mes amies sortaient. Avaient des dates. Découvraient leur sexualité. Les différents cocktails des terrasses les plus hot en ville. Moi je recevais ma belle-famille ou des couples d’amis, je tondais le gazon, je nettoyais la piscine, j’entretenais mon bassin d'eau.
J’ai fait l’inverse de la normalité. J’me suis matchée jeune. J’ai eu ma vie rangée tôt. Je le regrette zéro. J’ai jamais été comme les autres. J’ai aimé cette phase-là de ma vie. Ça me convenait juste pas tant. C'était pas moi.
Non, j’en ai pas d’enfant. J’en aurai jamais. J’ai pas de semi-détaché à côté de ma belle-famille. Je passe pas mes fins de semaine à rénover mon sous-sol. J’serais jamais ce modèle tout tracé. Pis ça me dérange pu. J'deviens pu les yeux plein d'eau quand j'retourne par chez nous pis que j'croise des filles avec qui j'ai été au secondaire, un bébé dans chaque bras. J'le sais que c'est pas nécessairement ça la seule manière d'être heureux.